Nouvelles 27 AOÛT 2015

Entrevue de l’AMA : Michael K. Gottlieb

Michael K. Gottlieb est le sous-directeur adjoint du Bureau de la Maison-Blanche chargé de la politique nationale de lutte contre la drogue (ONDCP). Ce Bureau conseille le Président des États-Unis en matière de politique antidrogue et élabore la stratégie nationale de lutte contre la drogue. Avec une expérience de plus d’une décennie au sein du mouvement sportif international, M. Gottlieb siège actuellement au Conseil de fondation, au Comité exécutif et au Comité Finance et Administration de l’AMA.

Si l’on considère l’ensemble de votre carrière dans le mouvement sportif international, d’où vient votre passion pour le sport?

MG : Le sport a toujours joué un rôle important dans ma vie. Plus jeune, j’ai été un étudiant-athlète multisports : je jouais au football américain et au basketball et je fréquentais les pistes d’athlétisme. J’aimais beaucoup l’activité physique, l’esprit d’équipe et la compétition. Le sport a conservé toute son importance dans ma vie d’adulte. Aujourd’hui, il m’importe moins de faire de la compétition que de rester en forme et actif par tous les moyens. Il y a longtemps que j’ai troqué mon casque et mes épaulières de football contre des lunettes de natation, un vélo et un tapis de yoga.

Vous êtes lié de près au mouvement mondial antidopage et à l’AMA. Qu’est-ce qui motive votre engagement envers le sport propre?   

MG : En tant qu’athlète, entraîneur de jeunes et administrateur, je me rends compte des bienfaits du sport sur la santé ainsi que des valeurs morales qu’il enseigne. Aujourd’hui, comme parent, je constate de visu à quel point l’expérience du sport contribue au développement du caractère. Le dopage c’est de la tricherie, et il sape à la base tous ces attributs louables. C’est pourquoi je me passionne tant pour la promotion et la préservation du sport propre.

Qu’est-ce qui vous a initialement amené à vous intéresser aux aspects juridiques et politiques de la santé publique et de la lutte contre le dopage?

MG : En fait, c’est une occasion qui s’est présentée à moi. J’ai accepté un poste à l’ONDCP, alors que l’AMA et l’agence antidopage américaine (USADA) étaient aux premiers stades de leur formation. La Maison-Blanche voulait mettre sur pied une équipe pour coordonner les efforts antidopage à l’échelle de notre gouvernement. Je possédais alors une expérience professionnelle en droit de la santé publique, pour avoir travaillé à la Food and Drug Administration des États-Unis sur des questions liées au contrôle des drogues, des compléments alimentaires et du tabac. Mon gouvernement a donc pensé à me confier le portefeuille. Quinze ans et trois présidents américains et de l’AMA plus tard, je ne saurais être plus satisfait ni plus fier de nos réalisations communes au sein du mouvement antidopage.

Vous avez travaillé pour les présidents Clinton, Bush et Obama. En quoi ces expériences ont-elles différées de vos activités antidopage?

MG :Contrairement à ce qu’on pourrait penser, mes expériences dans ces trois administrations ont été assez similaires. Chacune a fortement appuyé les efforts antidopage de l’ONDCP ainsi que notre collaboration avec l’AMA, l’USADA et d’autres pouvoirs publics. Le Congrès a aussi accordé un soutien indéfectible à ce dossier par la mise à disposition de généreuses ressources financières et la ratification rapide de la Convention de l’UNESCO. Le dopage n’a pas été abordé comme un enjeu partisan ou politique. Ce vaste soutien a largement contribué à l’avancement du dossier sur la scène nationale, de même qu’à l'amélioration de notre position internationale sur cette question.

En qualité de sous-directeur adjoint de l’ONDCP, quelles sont vos responsabilités et comment sont-elles liées au travail de l’AMA?

MG : La mission de l’ONDCP et celle de l’AMA sont complémentaires et présentent une excellente synergie avec mon travail. L’ONDCP cherche à promouvoir la santé des personnes et la sécurité des communautés en réduisant la consommation de drogues et ses conséquences. Je participe à la coordination des mesures politiques fédérales avec des entités locales et étatiques. Je dirige également le High Intensity Drug Trafficking Areas Program, un programme national qui accorde 245 millions de dollars américains en subventions pour faciliter la coopération et l’innovation entre les organismes d'application de la loi et les agences de santé. En fin de compte, mon travail consiste à établir de solides partenariats et des programmes efficaces pour promouvoir la santé des communautés. Ces responsabilités s’harmonisent parfaitement avec mon travail de lutte contre le dopage.

Vous siégez au Comité exécutif et au Conseil de fondation de l’AMA, et vous comptez parmi les quatre seuls fonctionnaires sur le Comité Finance et Administration. Qu’y avez-vous appris?

MG : J’ai appris que les partenariats ont une grande importance, surtout dans le sport mondial. Les progrès réalisés dans la lutte contre le dopage découlent directement d’une collaboration multidisciplinaire et transfrontalière. Les diverses parties prenantes de ce mouvement partagent un but commun unificateur dont elles font le pilier de leurs activités et de leur partage de savoir-faire. Nous obtenons les meilleurs résultats lorsque nous nous concentrons sur notre immense responsabilité envers les sportifs propres et le sport sans dopage. 

Vous avez été choisi pour participer à des missions d’observateurs indépendants (OI) de l’AMA. Croyez-vous que le programme soit encore pertinent?

MG : Le programme des OI est aussi utile maintenant qu’à sa création. La présence d’une équipe d’experts indépendants sur place pour surveiller tous les aspects du programme de contrôles d’une manifestation est essentielle pour accroître la qualité des contrôles, de même que pour renforcer la confiance des athlètes et du public à l’égard de la transparence du système. Je sais qu’« espérer un sport propre à 100 % grâce aux contrôles n’est pas réaliste », tout comme « nous ne réglerons pas le problème en procédant à des arrestations ». Des enquêtes fondées sur le renseignement et des preuves non analytiques de violations des règles antidopage sont essentielles à nos efforts. Toutefois, de récentes données montrent clairement qu’une supervision et un suivi des instances sportives et des pouvoirs publics par toutes les parties prenantes demeurent fondamentaux. Le programme des IO est un outil unique dans notre arsenal, et j’aimerais qu’on étende sa portée.

Vous entretenez une étroite relation avec les Nations Unies quant à certains enjeux du sport. À votre avis, quelle a été l’importance de la Convention de l’UNESCO contre le dopage dans le sport? Et qu’espérez-vous de la Conférence des parties cette année?

MG : Je me souviens de la réunion initiale du comité de rédaction de la Convention de l’UNESCO à laquelle j’ai participé. Nous avons entrepris notre mandat animés uniquement de la conviction que le dopage dans le sport était une question de santé à laquelle les pouvoirs publics devaient accorder une plus grande attention. L’enjeu était relativement nouveau pour de nombreux gouvernements (hormis en Europe, où l’expérience régionale était importante). Depuis, nous avons parcouru des années-lumière, et il sera tout indiqué de souligner cet immense progrès lors de la prochaine Conférence des parties. Cela dit, il reste encore beaucoup à faire et l’heure n’est pas à la complaisance. Même si le Code mondial antidopage et nos programmes mondiaux s’améliorent sans cesse, nous devons multiplier les efforts pour mesurer la conformité et en rendre compte d’une manière significative et transparente. Il faut également ne pas perdre de vue l’importance vitale de la recherche scientifique et médicale. Le fonds de recherche nouvellement créé, auquel le CIO et les gouvernements contribuent pour financer les efforts de l’AMA en matière de recherche antidopage, est une initiative inestimable qui doit être applaudie.

Que pensez-vous des programmes antidopage dans d’autres sports professionnels aux États-Unis?

MG : Mon bureau ne supervise pas les efforts antidopage des ligues professionnelles, mais je suis très conscient des progrès continus des ligues à cet égard, ce qui est très encourageant. Nous partageons l’objectif commun de promouvoir le sport propre, et il est plus facile de l’atteindre en travaillant ensemble. Par exemple, le partenariat établi entre les ligues, l’AMA et l’USADA en matière de recherche et d’éducation illustre le puissant effet de levier que produisent la mise en commun des ressources et la collaboration dans l’intérêt des sportifs propres.